Historique : le jeûne existe depuis des milliers d’années…

Jeûne : Rien de neuf !

Arrêter de manger de temps en temps n’est pas une mode, encore moins une nouveauté. La différence à notre époque c’est qu’il s’agit d’un choix, et que la décision de jeûner répond à une surcharge alimentaire devenue habituelle dans les pays occidentaux.

Une alimentation en décalage avec nos besoins

Nous mangeons mal, trop, et trop souvent. Nous avons oublié d’accorder notre alimentation à nos besoins, et ces besoins ont diminué avec les progrès techniques (transports, communication, utilisation des énergies fossiles…). L’industrie agro-alimentaire produit beaucoup et en toutes saisons, nous offrant des choix infinis de janvier à décembre.

Une adaptation ancestrale au jeûne

Dans la préhistoire de l’espèce humaine, nos ancêtres ont dû traverser des périodes de disette. Il a fallu s’adapter, ou périr. Nous descendons évidemment de celles et ceux qui ont su s’adapter, en stockant l’énergie métabolique lorsque la nourriture était disponible, et en résistant au jeûne lorsque les ressources s’étaient taries. L’organisme s’est ainsi habitué à alterner des phases d’abondance alimentaire et des phases de restriction imposées par la nature ou le climat. Pendant ces périodes d’abstinence forcée, nos aïeux devaient conserver leur capacité à se déplacer, et à rester capables de percevoir leur environnement pour y trouver de la nourriture.

Un héritage génétique méconnu

Cette capacité s’est inscrite dans le patrimoine génétique de notre espèce, et nous en avons hérité. Sans le savoir, et sans jamais l’employer. Nous mangeons tous les jours, en augmentant nos réserves énergétiques sans les déstocker. Les chercheurs contemporains sont unanimes : la frugalité et l’exercice physique sont des facteurs essentiels de longévité et de santé. Il nous appartient d’en prendre connaissance et de retrouver le chemin d’une santé qui s’accorde extrêmement bien avec celle de notre environnement.

Le jeûne dans les religions

Si diverses religions ont ensuite inclus la pratique du jeûne dans leurs préceptes, c’est le plus souvent pour s’adapter aux rythmes naturels (les saisons de récoltes et d’abondance alternent avec les saisons de repos et de restrictions), mais aussi pour recommander un moyen simple de rester à l’abri de la maladie.

Jeûne : une histoire qui est aussi médicale

Si la pratique du jeûne en France se développe encore assez loin de la médecine institutionnelle, ce qui est à notre avis bien dommage, cela n’a pas toujours été le cas.

Plus tard, au 15ème et au 16ème siècle,

deux livres, écrits par Luigi Cornaro, un noble vénitien, puis Leonardus Lessius, un jésuite et théologien, rencontrent un grand succès. Ils décrivent les liens entre santé, longévité et frugalité.

à la fin du 19ème siècle

Mais le véritable essor médical du jeûne va se faire à la fin du 19ème siècle, en Russie. Les expériences du Dr Nikolaiev vont être à l’origine de nombreuses observations des effets du jeûne prolongé chez l’humain, notamment au plan thérapeutique. Les travaux des équipes médicales russes sont hélas manuscrits, rédigés en russe, et conservés dans les archives de l’Académie des Sciences à Moscou, dont l’accès est malaisé, surtout depuis quelques années.

août 1954

Aux Etats-Unis, c’est Herbert SHELTON qui représente la figure de proue de l’hygiénisme, un mode de vie et de soins basé sur la connaissance de la biologie.

Il s’attache à déterminer les véritables besoins de l’être vivant, parmi lesquels le jeûne figure en bonne place, au même titre – dit-il – que la nourriture, la respiration, la lumière, l’exercice et le repos. 

Herbert SHELTON a accompagné plus de 30 000 jeûneurs au cours de sa carrière, et son ouvrage sur le jeûne demeure une référence.
C’est lui qui a inspiré le Mahatma Gandhi, qui a jeûné 17 fois dans sa vie, comme on sait pour des raisons assez éloignées des préoccupations de santé.

On mentionne pour mémoire une manifestation originale d’un groupe de suédois. Le premier août 1954, onze membres de la Swedish Vegetarian Society sont partis à pied de Göteborg pour marcher jusqu’à Stockholm, en dix jours.

Dans des circonstances ordinaires, c’est déjà un bon rythme de progression, mais cette démonstration visait à terminer le voyage sans prendre aucune alimentation, à l’exception de l’eau de source. Conduits par un médecin, le Dr Lennart Edrén, le but était de prouver que le jeûne peut améliorer la santé sans nuire à l’endurance.

Évidemment, la perte de poids de ces hommes en bonne santé a été de l’ordre de 1kg par jour, ce qui a été publié dans la presse, et la performance a suscité un intérêt très important en Suède et en Europe. Certains médecins avaient condamné l’aventure dès le départ en la qualifiant de « folie ».

Le 10ème jour, conformément au programme, dix des onze participants sont arrivés à Stockholm, acclamés par une population informée par la presse. Ils ont été examinés par les médecins du plus grand hôpital de Stockholm, qui ont exprimé leur étonnement devant le bon état de santé de la troupe.

VIe siècle av. J.-C.

Dans l’histoire, l’étude des effets du jeûne pour préserver ou restaurer la santé ne date pas d’hier. On peut par exemple mentionner les écrits de Pythagore (6ème siècle avant notre ère) qui recommandait à ses élèves une frugalité proche de certains régimes restrictifs actuels, ou du véganisme.

1760

Dans un dictionnaire médical publié en 1760, il est mentionné que la diète constitue un moyen thérapeutique en tant que tel dans les maladies infectieuses.

1851-1930

Parallèlement, en France le Docteur Guillaume GUELPA (1851-1930) va proposer une méthode de guérison du diabète, avant l’invention de l’insuline. Évidemment, il s’agit du jeûne. Ce médecin français propose la « cure de réduction précipitée » ou « Cure Guelpa » comprenant des jeûnes absolus de 2, 4 et 6 jours, avec purgation quotidienne. Résultat : « une respiration plus aisée, une souplesse plus grande des articulations, une amélioration des fonctions circulatoires et sensorielles, une activité plus libre de la pensée ».

Il publie plusieurs ouvrages : « La méthode Guelpa », « Auto-intoxication et désintoxication : un nouveau traitement du diabète et d’autres maladies chroniques », et en retrouvant ses origines italiennes « Jeûne et purgation : applications scientifiques, rénovation des tissus et rejuvénation des fonctions ».

Les comptes-rendus des interventions du Dr GUELPA à la Société de Médecine et de thérapeutique ont été oubliés. Mais de l’autre côté du Rhin, un médecin allemand a eu connaissance de ces publications et va s’en servir. Pour se soigner lui-même.

C’est le Docteur Otto Buchinger.

Ce médecin militaire allemand, rendu invalide par un rhumatisme articulaire aigu, fait lui-même l’expérience d’une guérison après un jeûne de presque trois semaines.

Spécialiste en médecine interne, il publie en 1935 son œuvre maîtresse « Das Heilfasten » (« le Jeûne Thérapeutique ») qui constitue la première description systématique de la physiologie du jeûne, et des pathologies qui peuvent être des indications à ce moyen de soigner.

20ème siècle

La pratique du jeûne va retrouver un intérêt en France pour un certain public dans la seconde moitié du 20ème siècle, sous l’impulsion d’un disciple de SHELTON, Désiré MERIEN, et surtout à l’initiative de Gertrud et Gisbert BÖLLING, originaires d’Allemagne.

S’inspirant d’une pratique répandue en Allemagne, et des publications médicales allemandes, ces deux pionniers du jeûne en France vont être à l’origine de la création de la Fédération Francophone de Jeûne et randonnée en 1990.